Quand on relit Molière après avoir lu « Le mot d’esprit et sa relation à l’inconscient » de Sigmund Freud, on ne peut s’empêcher de penser que Molière avait compris l’Inconscient sans le formaliser.
De la même manière, quand on lit Rossi, on ne peut comme lui s’empêcher de penser qu’Erickson avait déjà compris intuitivement comment fonctionnaient les rythmes ultradiens.
Mis à part Rossi, la plupart des élèves d’Erickson ont cherchés à vulgariser ses techniques et à les rendre plus rapide. Ainsi, par exemple, la PNL fait totalement l’impasse sur les rythmes ultradiens. Pourtant, ce sont ces rythmes qui permettent de comprendre pourquoi Erickson faisait parfois des séances de dix heures, parfois de huit, et parfois encore, des séances beaucoup plus courtes. C’est la connaissance de ces rythmes qui permet d’appréhender comment Erickson faisait pour augmenter la taille de la poitrine des femmes. Aujourd’hui, plus personne ne fait des séances de dix heures. Économiquement parlant, ce ne serait pas rentable.
Dans « Traité pratique de l’Hypnose », écrit en 1976, Rossi écrit : « Les approches d’Erickson relatives à la neutralisation des cadres conscients sont si subtiles et insidieuses dans la façon dont elles sont tissées avec le processus d’induction et de suggestion qu’elles passent généralement inaperçues, même lorsque l’on étudie la transcription écrite des mots qu’il a utilisés. Afin de les placer en perspective, nous avons souligné la microdynamique de l’induction et de la suggestion. »
Si les approches d’Erickson passent inaperçue dans le texte, c’est parce qu’elles s’appuient sur ces rythmes subtils, et qu’aucune transcription textuelle n’en fait état. Il écrit quelques pages plus loin : « « Nous faisons l’hypothèse que dans la vie de tous les jours, la conscience est dans état de flux permanent entre l’orientation générale à la réalité et la microdynamique temporaire de la transe. Un hypnothérapeute bien entraîné est extrêmement conscient de cette dynamique et de ses manifestations comportementales. L’expérience de la transe et l’hypnothérapie sont simplement un développement et une utilisation de ces processus psychodynamiques normaux. »
Il faut exercer depuis plusieurs années afin d’être capable de percevoir ces changements de rythme. Maintenant que nous savons qu’ils existent, cherchons à comprendre un peu mieux ce que sont ces rythmes ultradiens.
Dans « Du symptôme à la lumière » Rossi écrit « Le cycle de base d’activité et de repos est le rythme ultradien fondamental de quatre-vingt-dix à cent vingt minutes, décrit à l’origine par Nathaniel Kleitman pour caractériser la périodicité la plus importante de l’expérience humaine : les activités sociales, l’efficacité des performances humaines, la mémoire et l’apprentissage, aussi bien que la faim, les sécrétions hormonales, la croissance cellulaire, la reproduction et la guérison sont apparemment tous liés à un cycle de base d’activité et de repos commun ou à des synchronisateurs multiples de ce cycle. Le cycle de base d’activité et de repos de Kleitman peut être considéré comme une sorte de fenêtre sur les processus psychobiologiques les plus fondamentaux de l’expérience humaine qui peuvent être touchés ou entraînés par le travail hypnothérapique, facilitant ainsi la communication et la guérison corps-esprit. »
Les rythmes ultradiens sont étudiés depuis les années soixante, mais ce n’est que ces dernières années que les découvertes les plus précises ont pu être faite. Plusieurs prix Nobel de médecine, dont les plus récents en 2017, ont étudiés comment le corps faisait, en dehors de toute stimulation extérieure (changement de température, lumière du soleil etc.) pour s’autoréguler.
Trois rythmes majeurs ont été mis à jour. Des rythmes de cinq minutes, vint minutes et des rythmes de deux heures. Chacun de ces rythmes est lié à la division cellulaire, ou comment l’ADN d’une cellule change subtilement lorsqu’elle se divise afin d’engendrer la génération cellulaire suivante.
Rossi pense que lors d’une séance d’hypnose où l’on utilise ces rythmes – plusieurs cycles de deux heures, dans le cas de séances de dix heures – le fonctionnement de l’esprit permet d’influencer le fonctionnement du corps jusqu’à un niveau génétique. Je ne sais pas à quel point la théorie de Rossi est exacte. Pour ma part, je la considère comme vrai et ait d’excellents résultats avec.
Il faut comprendre que cette découverte majeure est une véritable révolution dans la manière de travailler. Si nous prenons l’exemple de l’arrêt du tabac grâce à l’hypnose, la manière « classique » de procéder, consiste à dégoûter le consultant du tabac. Ou alors, ce que l’on trouve parfois dans les vidéos sur internet, il s’agit de donner des suggestions comme « maintenant, vous vous libérez de la cigarette ».
Mais si la vidéo n’emploie pas vos propres mots, ceux que vous utilisez au moment de la séance (les mots que vous employez un jour pour l’arrêt du tabac ne sont pas forcément les mêmes que vous emploieriez le lendemain) et ne respecte pas vos rythmes ultradiens, les chances de réussite sont grandement amoindries. De la même manière, si vous êtes dégoûtés du tabac mais que votre corps a toujours la sensation d’être fumeur, vous risquez d’être tiraillés entre votre besoin de fumer et le dégoût que cela vous inspire, avec souvent du stress à la clef.
Travailler avec les rythmes ultradiens, au contraire, garantit les meilleures chances de succès. Rossi s’est aperçu que derrière nos comportements de la vie de tous les jours, il y avait des processus physiologiques. Lorsque nous mangeons, lorsque nous faisons une pause, lorsque nous sommes stressés… Tous ces moments au cours d’une journée résultent d’une part, mais influencent également, les niveaux d’hormones dans le corps, le cortisol, la testostérone, etc. Ils ont un impact sur le système nerveux, sur le système endocrinien, sur le système musculo-squelettique. Ainsi, lorsque nous travaillons avec les rythmes ultradiens, nous demandons au corps de s’adapter à une nouvelle réalité : celle d’être non-fumeur dans le cas d’une hypnose pour l’arrêt du tabac. Et être non-fumeur, c’est dans la tête, mais pas uniquement !
Ainsi, lorsque tous vos systèmes physiologiques se sont coordonnées afin de vous projeter dans une réalité où vous êtes devenus non-fumeur, tous les comportements associés à la cigarette disparaissent spontanément, car devenus obsolète.
Pour vulgariser, nous pourrions dire que l’hypnose par suggestion, c’est un peu comme un patch correctif sur un programme, un patch qui ne dure que dix jours. Alors que l’hypnose ultradienne, c’est une mise à jour complète. Une nouvelle version totalement réinitialisée, donc qui dure dans le temps.
Pour encore aller plus loin:
=> différents cas du meilleur hypnothérapeute, le docteur Milton Erickson :
- Redonner de la féminité
- homme souffrant de douleurs multiples suite à un cancer en phase terminale